Alors que les rayons du soleil caressaient sa fourrure d’or pâle, le lion majestueux se leva avec la lenteur assurée d’un roi indétrônable. Il s’étira, ses muscles puissants roulant sous sa peau scintillante, et poussa un bâillement profond, dévoilant des crocs étincelants. Depuis des décennies, il veillait sur son royaume, baigné par la lumière bienveillante de l’astre du jour, veillant à ce que cette terre reçoive du soleil sa force et sa fougue. Sa longue crinière, plus proche d’une cascade de soie dorée que d’une toison animale, dansait sous la brise. Les scarifications en forme de soleil qui ornaient ses épaules semblaient luire doucement. Relevant la tête, ses bracelets d’or brillant à ses pattes avant, il posa son regard couronné de fleurs de tournesol sur le ciel, où un battement d’ailes familier annonçait l’arrivée de Mwanzo.
Le magnifique aitvaras se posa avec grâce sur la branche la plus haute d’un arbre voisin, ses plumes scintillantes captant les rayons du soleil dans une danse chatoyante. Sa crête rouge, ornée de bagues d’or, étincelait comme une couronne forgée par les étoiles. Les flammes astrales qui s’échappaient de sa longue queue ondulaient avec la légèreté d’un vent cosmique. Avec une élégance théâtrale, il exécuta une révérence volontairement exagérée, arrachant à Jua’mkuu un rire puissant et chaleureux. Le lion répondit à la salutation du coq avec un signe de tête. Cela faisait des années que les trinités des astres ne s’étaient pas retrouvées, et Jua’mkuu savourait ce moment rare, un souvenir encore gravé en lui depuis qu’il avait succédé à son père en tant que lwa du Soleil.
Leur aîné, le serpent cornu Ardhi, arriva quelques heures plus tard, lorsque le soleil, baigné de couleurs chaudes et douces, effleurait l'horizon. Ses cornes de bélier semblables à des saphirs, délicatement lumineuses à leur pointe, brillaient sous la lumière tamisée du crépuscule. Enroulé dans ses anneaux puissants, ses écailles de nacre semblaient capturer chaque rayon, renvoyant des éclats qui dansaient autour de lui. Le cliquetis de ses bijoux de bronze, de perles vertes et bleues, se mêlait aux murmures du vent. Des plumes délicates ornaient les parures de sa queue, et à chacun de ses mouvements, un frisson d’énergie cosmique se déployait. Mwanzo, qui avait convoqué cette rencontre sans en révéler la raison, attendait avec une anticipation palpable, sachant que ce moment serait bien plus qu'une simple réunion.
Lorsque le dernier éclat du jour se dissipa, et que les premières étoiles se suspendirent dans l’immensité du ciel, l’aitvaras sentit à nouveau cette présence insaisissable, ce vide béant qui semblait dévorer l’âme du monde. Le ciel nocturne, paré de sa robe de diamants étincelants, n'apaisait en rien ce sentiment d'incomplétude, même avec la Lune, son plus beau joyau, brillant de mille feux. La brise fraîche effleurait la terre, mais l'air semblait lourd autour de lui. Pourtant, ni Ardhi ni Jua’mkuu ne semblaient partager ce malaise, leurs présences sereines, ancrées dans la Terre et le Soleil, indifférentes à l'ombre qui obscurcissait l'esprit du lwa.
Avec une profonde tristesse, Mwanzo tourna son regard vers la pleine lune, son éclat argenté baignant le monde d’une lueur douce et intime. C’était de cette lune que tout avait émergé, née des cendres de Théïa, l’esprit d’un monde éteint, oublié, mais pourtant vital. Sans elle, ni l’astre de la nuit, ni même la Vie n’auraient trouvé leur ancrage dans ce monde. Le coq était en paix avec cette vérité, mais chaque nuit, une sensation persistante l’envahissait, un vide sidéral, comme si une dernière création, née de l’union sacrée de la Terre et de Théïa, n’avait jamais vu le jour. Ce manque restait là, invisible mais tangible.
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